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La faute à Eve

Le bon Dieu est misogyne… Anne Sylvestre

 

Et l'Eternel contempla la femme qu'il avait formé. Alors, Il déclara : « Tant pis ! elle se maquillera... »

 

A travers ses nombreuses relectures, humoristiques ou théologiques, le récit de la création du monde a acquis une solide réputation de misogynie. Réputation méritée ? A voir...

 

Certes le récit fut écrit par et pour des hommes mais au-delà de l'image de la tentatrice que l'Eglise a cru bon y voir, que contient-il vraiment ? Que dit-il sur les relations hommes et femmes ?

Premièrement, la femme n'est pas « le produit d'un os surnuméraire ». En fait, avec cette histoire de côté, le texte lui donne d'emblée le statut d'égale, de vis à vis de l'homme : chair de sa chair, os de ses os. Sa provenance n'est pas une manière de la rabaisser. La femme n'est pas créée pour être l'esclave de l'homme, ni pour être dominée par lui. D'ailleurs, contrairement à ce qui se passe pour les animaux, l'homme ne la nomme pas. Ce n'est pas anodin : nommer quelqu'un c'est prendre sur lui un pouvoir. La femme échappe à cette prise de pouvoir et sera simplement isha : féminin de ish, l'homme (l'hébreux est ici intraduisible en français).

Significative aussi cette promesse : "l'homme quittera son père et sa mère, il s'attachera à sa femme" qui est l'inverse exacte du message véhiculé par notre tradition matrimoniale. Pour nous, la femme perd son nom, son mari la reçoit de sa famille, mais dans le texte, c'est l'homme qui passe ainsi de sa famille à sa femme, c'est lui qui est placé en situation de besoin.

 

- Oui, c'est bien joli tout ça, mais enfin, c'est quand même bien la femme qui est déclarée responsable de la chute !

Oui, elle est responsable mais pas seule. Et celui qui est déclaré tentateur et séducteur, c'est le serpent, symbole phallique s'il en est. En fait, c'est l'humanité toute entière (homme et femme) qui porte ici la responsabilité de la chute. Une fois encore, la femme est associée à l'homme, pas forcément pour le meilleur mais n'est-ce pas le prix de l'égalité ?

 

Et tes désirs se porteront vers ton homme, mais il dominera sur toi.  Là, il est difficile de nier qu'il y a domination de l'homme sur la femme. D'autant que c'est à partir de ce moment que l'homme va véritablement nommer, et donc prendre un pouvoir sur son épouse : Eve. Mais cette domination n'est pas naturelle, elle n'est pas bonne, elle n'est pas conforme au plan de Dieu. Ce texte, pourtant écrit dans une société patriarcale, affirme que la soumission de la femme à l'homme n'est pas la volonté de Dieu mais la conséquence de la volonté humaine de s'établir comme dieux, le triste résultat du désir de puissance qui habite l'humanité...

Alors, sans doute, ce texte peut-il se comprendre comme justification d'une société patriarcale mais il est,paradoxalement, bien plus moderne que les délires misogynes auxquels il a donné naissance.

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À propos
Eric George

Pasteur de l'Eglise Réformée de France, amateur de jeux de société, de cinéma, de longues discussions
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