5 Mai 2006
Marie a élevé et allaité Dieu. Elle Lui a préparé des bouillies et des soupes Martin Luther
Que dire sur un blog protestant au sujet de Marie, véritable symbole (j'allais écrire "icône") de la séparation entre catholiques et protestants ?
Eh bien peut-être rappeler que s'il m'est difficile de me retrouver dans la mariolâtrie d'un certain catholicisme, Marie n'en reste pas moins un personnage biblique important à mes yeux. Je dis bien à mes yeux parce qu'objectivement, l'importance de Marie n'est pas évidente : inconnue de Paul, anonyme pour Jean, la mère de Jésus est moins souvent mentionnée dans le nouveau testament que Pierre ou Judas.
Alors, en quoi Marie est-elle si importante ? En son rôle de mère de Dieu ? En fait, malgré la citation en exergue, pas vraiment. Bien sûr, l'incarnation tient une place importante dans ma théologie mais à partir du moment où Dieu décide de se faire homme complètement, il lui faut bien une mère.
Ce n'est pas davantage pour son rôle d'intercesseur. Le visage du Christ ne m'est pas si sévère que j'aie besoin d'une médiatrice fut-elle féminine et maternelle...
Marie, figure de l'Église ? L'idée est en effet présente dans quelques textes mais c'est une notion qui me paraît aussi dangereusement incompréhensible aujourd'hui que celle de nouvelle Ève. Faire de Marie, mère du Christ, le symbole de l'Église, épouse du Christ, c'est prendre le risque d'embrouiller tout à fait les esprits déjà quelque peu perplexes face à la notion de Jésus, fils de Dieu et Dieu.
Je pense qu'il est inutile que je m'attarde sur l'immaculée conception et sur la virginité perpétuelle, des inventions qui n'ont rien de biblique et qui demandent force contorsions théologiques et exégétiques.
Alors, que reste-t-il de Marie de Nazareth ? Eh bien, précisément tout ce qu'on lui retire en la glorifiant, en la faisant reine céleste : le visage d'une femme ordinaire. Choisie par Dieu sans raison, mère de Jésus, mais surtout disciple de celui-ci. Marie est le visage féminin qui manque souvent parmi les disciples. Comme eux, elle a ses moment d'enthousiasme et d'inspiration (Luc I, 46 à 55) mais aussi de doutes d'incompréhension (Luc II, 50 à 51) voire de refus (Marc III, 21 et 31-35) . Comme eux, elle nous renvoie à nous même et nous montre que c’est dans notre humanité que Dieu nous rejoint. Ce portrait de Marie à travers les textes bibliques témoigne, à mes yeux, de l'irruption de la grâce bien plus que toute les vierges souveraines.
Pasteur de l'Eglise Réformée de France, amateur de jeux de société, de cinéma, de longues discussions
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