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Ce que l'Esprit dit aux Eglises (1) Combat et amour à Ephèse

Prédication du 3 mai 2009
Matthieu X, 34-36
Ephésiens VI, 10-24
Apocalypse II, 1 à 7

Durant notre voyage en Turquie, nous avons eu la chance de trouver Ephèse presque déserte et donc de bien profiter du site. Mais de toute façon, même pleine de touristes, Ephèse reste déserte d'éphésiens et ce n’est pas en vous décrivant le théâtre ou la bibliothèque de Celsus que nous aurions pu découvrir les éphésiens. Mais est-ce vraiment un mal ?
Si nous ne lisons ces lettres que comme des messages adressés à des communautés bien précises vivant sous d'autres cieux et à une autre époque, si nous nous contentons de nous demander qui sont les nicolaïtes ou quelle était la profession de Tychique que Paul recommande à la communauté, nous ne faisons que lire un courrier qui ne nous est pas adressé afin d'assouvir une curiosité historique ou tout simplement malsaine. Mais parce que ces lettres sont des textes bibliques nous pouvons considérer qu'ils nous parlent aujourd'hui et ici à Evreux. Bien sûr, il serait catastrophique d'oublier qu'Evreux n'est pas Ephèse et de partir en quête des Nicolaïtes d'aujourd'hui ou du Tychique que nous devons recevoir.
En revanche, dans la lettre aux Ephésien, dans le message à l'Eglise d'Ephèse, Paul et Jean de Patmos sont porteurs d'une vérité tellement universelle qu'elle nous atteint aujourd'hui. D'ailleurs, le texte de l'Apocalypse nous précise bien que toutes les Eglises sont invitées à entendre le message adressé à l'Eglise qui est à Ephèse Que celui qui a des oreilles entende ce que l'Esprit dit aux Églises: (Ap II ; 7)
Le message qui nous est adressé en même temps qu'à Ephèse tient en deux mots : "Combat" et "Amour".

Paul et Jean de Patmos sont unanimes : la foi chrétienne est un combat. C'est une déclaration qui peut surprendre. En effet, la grâce et l'amour s'inscrivent mal dans une logique guerrière. Et pourtant, c'est pour sa haine des méchants que l'Eglise à Ephèse est louée, pour sa persévérance au combat. A lire l'Apocalypse, il semble bien que les éphésiens soient resté fidèle à Paul qui les exhortait à revêtir le costume du chrétien, un costume évoquant bien plus la panoplie du légionnaire que la tenue nuptiale. La foi chrétienne est un combat.
N'en déplaise à Jean Jacques Goldman et à ceux qui, avec lui, aspirent "à ce repos d'âme que [donnerait] la foi", Jésus Christ n'est pas venu apporter la paix mais l'épée. Mais alors, qu'en est-il du message de la grâce ? Après tout, le combat n'est-il pas synonyme d'effort constant ? Nous savons tous que le parcours du combattant n'a rien d'une promenade de santé. Il n'y a pas de contradiction : nous ne combattons pas pour être aimé de Dieu mais parce que Dieu nous aime. La grâce ne consiste pas seulement à être aimé, elle nous transforme aussi. Nous ne combattons pas pour que notre coeur soit changé mais parce que notre coeur est changé. L'amour de Dieu pour nous, nous pousse à aimer à notre tour.
Et c'est là qu'est le combat : nous sommes envoyés par amour, pour l'amour dans un monde qui refuse l'amour. Comment n'y aurait-il pas de friction ? Comment notre foi ne nous conduirait-elle pas à nous opposer à la logique de ce monde ? Le combat chrétien n'est pas l'inquisition ou la croisade, si Dieu remplace la carapace dans laquelle nous nous enfermons par des armes défensives, la seule arme offensive qu'il nous donne c'est le glaive de sa Parole, ce n'est pas une arme qui donne la mort mais une arme qui donne la vie. Combattre le monde, ce n'est pas haïr le monde (ce qui serait une soumission à sa logique) c’est aimer ce monde de haine. C’est dans l’amour que se manifeste notre résistance et la victoire de notre Dieu.

Et non seulement le monde est en tout point opposé à l'amour, ce qui donne à notre combat un aspect quotidien, mais ce combat commence en nous même. Attention, je ne parle pas ici d'un combat que nous devrions mener contre nous même, mais simplement du fait que nous résistons de toutes nos forces à cette transformation que Dieu opère en nous. Bref, nous vivons la dépétrification de nos cœurs comme un combat.
En effet, tout comme notre monde, nous refusons l’amour. Pour nous en convaincre, il suffit de voir à quel point l’idée d’amour des ennemis nous paraît impossible. Or, il s’agit bien d’aimer nos ennemis, pas seulement de leur faire du bien, mais de les considérer comme précieux à nos yeux, avoir du plaisir à leur faire du bien (comme on a du plaisir à faire du bien à nos amis). Il ne s’agit pas non plus de prétendre les aimer sans jamais agir en conséquence, bien sûr. Puisque cet amour des ennemis nous paraît tellement impossible, cela ne signifie-t-il pas que lorsque nous prétendons vouloir aimer, nous voulons surtout être entouré de gens aimables ? Et de même, lorsque nous crions vouloir être aimé pour ce que nous sommes ? Ne prétendons-nous pas surtout à être reconnus comme digne d’amour ? Voulons-nous donc être aimé ou voulons nous être considérés comme aimable ?

Et c'est bien parce que, nous même, nous sommes étrangers à l’amour, que le combat que nous fait mener notre foi risque à tout moment de se couper de son origine. C’est ce qui se passe pour l’Eglise à Ephèse. Elle est une Eglise persévérante, zélée, active, militante, fidèle à sa foi, engagée auprès des autres. Et pourtant, elle est desséchée, elle s’est coupée de sa source. Son combat, aussi acharné soit-il, est devenu croisade, inquisition et destruction. Ses œuvres, aussi belles soient-elles, sont devenues devoir, obligation et servitude.
La foi chrétienne est un combat parce qu’elle est l’irruption de l’amour dans un monde sans amour, de la lumière dans un monde de ténèbre. Si elle perd cet aspect, elle n’est plus qu’un aspect du monde et elle n’a plus rien à voir avec Christ. Ironiquement, le chandelier, c’est à dire la vérité de Dieu, au nom de laquelle elle prétend combattre, lui est retirée.
Mais cette mise en garde n’est pas là pour nous culpabiliser. Ce serait aussi également nous couper de la source que de nous morfondre parce que nous n’aimons pas assez, que de faire de l’amour un devoir ou une obligation. En fait, dans cette mise en garde, il y a une promesse : l’Eglise à Ephèse s’est desséchée mais le porteur de chandelier, la source d’amour et de vérité continue à s’adresser à elle. Il reste au milieu d’elle. L’Eglise à Ephèse ne sait plus pourquoi elle se bat mais elle n’est pas abandonnée, l’amour reste là, accessible, offert. Elle l’a perdu de vue mais il ne s’est pas éteint. Que celui qui a des oreilles écoute ce que l’Esprit dit aux Eglises

Frères et sœurs. Dieu est à nos côtés, il nous aime et nous conduit à aimer. Voici la source de tous nos engagements, voici la source de tous nos combats, voici l’assurance de notre victoire. Que l’amour conduise notre vie.
Amen
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À propos
Eric George

Pasteur de l'Eglise Réformée de France, amateur de jeux de société, de cinéma, de longues discussions
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