10 Octobre 2006
A la suite de Dangereuse miséricorde, note dans laquelle j'affirmais (une fois de plus) ma foi en l'absolu gratuité de l'amour et du salut de Dieu, Frédérique me faisait la remarque qu'il fallait tout de même accepter cet amour et ce salut. C'est une compréhension que l'on trouve aussi bien dans le protestantisme que dans le catholicisme (preuve que nos divergences sont ecclésiologiques plutôt que théologiques).
Le salut peut se comprendre de 2 manières : eschatologique (l'homme est sauvé à la fin des temps) et existentiel (le salut se reçoit et se vit au coeur d'une vie). À noter que ces deux lectures ne sont pas forcément contradictoires, au contraire elles correspondent très bien à la tension du Royaume de Dieu entre "déjà là" et "pas encore".
Pour le salut eschatologique, je ne crois pas du tout que la volonté de l'humain, son acceptation entre en ligne de compte. Tout simplement parce que ce serait soumettre la volonté de Dieu à la volonté humaine. Même Augustin qui est en quelque sorte l'inventeur du libre arbitre limite fortement le rôle de celui-ci dans le salut.
Pour le salut existentiel, je reconnais que les choses sont plus floues. Il est évident que je puis résister et lutter de toute mes forces contre ce Dieu qui veut me saisir, soit parce que je veux rester dans mon mal-être, soit parce que je refuse ce dépouillement de moi-même qu'est la grâce (par excès d'abaissement ou par excès d'orgueil, donc). Et il m'arrive souvent de triompher dans cette lutte, de me complaire dans la captivité de moi-même et de rejeter cette libération que Dieu m'offre. Cela signifie-t-il qu'à d'autres moments, je l'accepte de mon plein gré ? Ou bien Dieu me donne-t-il même d'accepter sa grâce. Ici, chaque réponse est problèmatique. Si je dis que Dieu me donne d'accepter, alors cela signifie-t-il qu'il refuse ce don à d'autres ? Et si au contraire, j'affirme que mon "oui" à Dieu vient de moi, Dieu n'est-il pas assujetti à l'homme et par voie de conséquence les non croyants ne sont-ils pas inexcusables ? Il ne peut pas y avoir de réponse définitive à ce débat de la grâce, seulement une mise en interrogation constante. Mais c'est comme ça que je comprend la théologie, un questionnement perpétuel de nos réponses.
P.S. Frédérique a depuis précisé sa pensée de manière très belle et très riche, je vous encourage vivement à aller lire ses derniers commentaires sur Dangereuse miséricorde.
Pasteur de l'Eglise Réformée de France, amateur de jeux de société, de cinéma, de longues discussions
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