27 Février 2022
Prédication sur Marc 3, 1 à 6
Quand Jésus revient à la synagogue, elle est devenue une nasse. Il y est épié , on cherche à l'accuser et surtout ceux qui sont là , sont devenu une masse anonyme , un "ils" mysterieux et hostile. Jésus est à la synagogue et un homme est là , à la main desséchée . Cet homme est-il là par hasard a-t-il été amené à dessein. Qu'importe... Soit Jesus enfreint la regle du sabbat, soit il laisse l'homme dans sa souffrance.
Nous connaissons tous ces situations de nasse, de piège. Parfois volontaire, parfois non, ces situations sans issue, où aucune solution n'est la bonne.
Nous les connaissons dans notre vie, et si ce n'était pas le cas l'actualité de ces derniers jours vient nous donner un exemple terrifiant de nasse diplomatique. ..
C' est dans ce brouillard hostile que Jésus va mettre de la clarté , qu'il va distinguer des humains.
L'homme à la main desséchée d'abord . La parole qui lui est adressée peut paraître violente "Dresse-toi ! Au milieu !"
Violente , parce que dans nos faiblesses, nous avons envie d'être consolés mais certainement pas d'être exposés.
Pourtant, à bien regarder le texte ce n'est pas la blessure de l'homme, sa main desséchée qui est exposée, c'est son humanité : avant même qu'il soit guéri , l'humain à la main desséchée devient simplement un humain.
La blessure, l'infirmité révélée, en fait, c'est celle de ceux qui sont autour dont la dureté de cœur semble bien plus grave que la paralysie de la main.
Je me garderais bien de donner l'impression de n'avoir ne serait -ce qu'une esquisse de solution à la tragédie ukrainienne mais, alors que nous allons beaucoup entendre parler de Poutine, de Zelensky , de l' OTAN, de l'Europe, de l'ONU et bien sûr de la Russie et de l' Ukraine, ses Eglise , c'est l'humain que nous devons mettre au centre : ce sont les civils et les soldats tués et leurs familles, ce sont les femmes et les enfants qui fuient leur pays , les hommes forcés de rester se battre, ce sont les humains et les humaines qui vivent sous les bombes et dans la peur.
Voilà, celles et ceux que nous devons mettre au cœur de nos préoccupations, de nos prières, celles et ceux que nous devons apprendre à distinguer.
Et puis, il y a les autres, tous les autres : ce" ils" hostile qui occupe la synagogue , qui guette Jésus, ce "ils" que Jésus interroge :
"Le jour du sabbat , est-il permis de bien faire ou de mal faire ? De sauver une vie ou de tuer ?"
On aimerait que la réponse à la guerre en Ukraine soit si simple, on aimerait qu'aucune des alternatives ne soit porteuses de mort.
Mais le problème dans ce récit, ce qui désole Jesus ce n'est pas la réponse à sa question, c'est le mutisme de l'assemblée.
De toute l'assemblée ! En effet, je ne crois pas qu'il n'y ait là que des pharisiens , on y trouve sans doute aussi des gens venus adorer , des curieux qui suivent Jésus et peut-être même - pourquoi pas - des disciples de Jésus.
Et tous sont regroupés dans ce "ils" qui guette pour voir si Jesus va guérir un jour de sabbat. Après tout, il n'y a pas de réelle urgence, demain, la main sera toujours sèche , il y aura toujours l'occasion de guérir.
Sans doute aussi trouvent -ils , comme nous que la question de Jesus est un peu binaire, un peu simpliste qu'il n'est pas toujours facile de savoir si l'on fait bien ou si l'on fait mal , et qu'entre sauver une vie et tuer , il y a beaucoup. d'autres options ...
Oui, je crois que nous connaissons tous les excellentes raisons que nous pouvons opposer à l'appel de Jésus, même dans les situations les plus simples... Alors dans une situation aussi complexe, aussi dangereuse que celle que nous traversons...
Alors, l'endurcissement du coeur, le mutisme, ça nous connait... Et c'est un peu désespérant de nous reconnaître si bien parmi ces cœurs durs...
Mais au sein de cette assemblée, un nouveau groupe va se distinguer "Les pharisiens sortent'" Dans cette assemblée au cœur endurci, certains vont finalement repondre à la question :" Le jour du sabbat , il est permis de s'allier avec nos ennemis pour perdre une vie"
En effet, les pharisiens qui reclament un respect strict de la loi et les herodiens, les partisans d'Hérode, vu comme un pantin au service de Rome ne sont pas vraiment bon ménage. Mais ce jour là, les pharisiens s'excluent de la synagogue pour aller comploter avec eux.
La guerison de la main desséchée ne peut rien transformer dans leur conviction, eux ils savent ce qu'est le bien, ce qu'est le mal, et au nom de ce savoir, Jésus doit mourir.
Frères et sœur, si nos mains sont paralysées, si nos cours endurcis nous empêchent d'agir, au moins n'ayons pas peur de rester dans la synagogue. Restons dans l'assemblée, restons dans nos questionnements plutôt que dans nos certitudes, dans nos incomprehensions plutot que dans nos refus.Restons dans la synagogue car c'est là que Jesus nous voit, c'est là que Jesus vient pour nous guérir
Amer
Pasteur de l'Eglise Réformée de France, amateur de jeux de société, de cinéma, de longues discussions
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