17 Juillet 2022
Dieu apparaît à Abraham au térébinthes de Mamre... Au-delà de la promesse d'un fils et du rire de Sarah qu'est ce qui se joue dans cette scène d'hospitalité ?
Une prédication sur Genèse 18, 1 à 10
YHWH apparut à Abraham aux térébinthes de Mamre
Et là , j'ai un peu envie de crier "Remboursez" parce que comme théophanie , comme apparition divine, c'est un peu pauvre... Je pense même que parmi toutes les fois où Dieu apparaît dans la Bible, c’est la plus pauvre… Pas de tonnerre, pas de tremblement de terre, pas de ciel ouvert, pas d’anges, même pas un petit buisson ardent…
Bon, ce n'est pas tout à fait exact , il arrive que la Bible nous dise que "Dieu apparut" sans nous dire du tout ce qui était vu.
Mais là, on nous dit ce qu'Abraham a vu ; c'est à dire rien d'extraordinaire, trois voyageurs à recevoir. Et toute la scène qui s'ensuit est une scène classique d'hospitalité. Cela nous parait un peu exotique, une scène d'hospitalité moyen-orientale. Pourtant, en y regardant de près, cela n'est pas vraiment éloigné de ce que nous faisons lorsque nous recevons
La seule différence, c'est qu'alors que nous faisons cela pour des gens que nous aimons, que nous apprécions, que nous avons invités, Abraham, lui, fait cela pour des gens qu'il ne connaît pas. Rien n'indique dans ce texte qu'il ait reconnu YHWH ou plutôt tout indique qu'il ne le reconnaît pas, si Dieu vous apparait, Vous l'invitez à casser la graine. Abraham a vu des voyageurs dans la chaleur du pour et il les a traités comme des invités, des hôtes. Peut-être qu'en Eglise, les visiteurs inconnus devraient pouvoir s'attendre au même accueil
Peut-être aussi qu'en période de réchauffement climatique, quand des régions entières devinrent inévitable, nous devrions garder en mémoire l'exemple d'Abraham. Et nous souvenir que cette hospitalité débouche sur une promesse et une fécondité : accueillir l’autre c’est donc s’ouvrir à un avenir
Mais je voudrais revenir à la première phrase de cette histoire
YHWH lui apparut aux térébinthes de Mamre Je l'ai dit, je ne crois pas qu'Abraham ait reconnu ses visiteurs, mais nous lecteurs, nous savons qui visite Abraham et nous voyons ce que cela produit, avant même l'annonce de la naissance à venir.
Abraham était assis à l'entrée de sa tente dans la chaleur du jour. En ce temps de canicule, en ce temps de fatigue (en tout cas pour l’aoutien que je suis), je trouve cette description très parlante, Il y a le poids de la chaleur, il y a le poids de la fatigue (dans les zones chaudes, c'est l'heure de la sieste) et Abraham est assis.
Il se tient à l'ombre, il se tient à l'entrée, il se tient dans un entre deux, entre lumière et obscurité, entre intérieur et extérieur et sans aucune motivation pour aller dehors ou pour aller dedans. Il est assis, immobile. Et YHWH lui apparait. Et Abraham va se mettre en mouvement...
Et j'insiste ce n'est pas parce qu'Abraham se met en mouvement que Dieu lui apparait, c'est parce que bien YHWH apparaît qu'Abraham se met en mouvement. Il va dehors, il va dedans, il court partout. C'est peut-être à cela qu'on reconnait une théophanie, une apparition de Dieu, quand elle se passe de son et lumière, de grandes manifestations, Dieu nous met, ou nous remet, debout et en mouvement.
Si je devais filmer cet épisode, je suivrais Abraham dans ses activités, je dirais presque dans son effervescence, mais je n'arrangerais pour qu'on ne voit jamais ses visiteurs se déplacer.
Parce que c'est comme ça que le texte est écrit : on les voit devant Abraham, on les voit manger à l'ombre des arbres mais on ne les voit jamais se déplacer. C'est un peu étrange car même s'il est normal que celui qui accueil s'affaire, en principe, dans une scène d'accueil, celui qui a fait le voyage, celui qui s'est déplacé c'est le visiteur. Or là, les visiteurs se tiennent là, déjà là, alors qu'Abraham va et vient. Du coup, on peut se demander qui est en visite et qui accueille qui.
Et ça, cela m’interroge sur ma vie, sur la présence de Dieu dans ma vie : je dis régulièrement que Dieu vient à nous et j’interroge ma capacité ou mon incapacité à l’accueillir… Mais finalement: est-ce moi qui accueille Dieu dans ma vie de chaque jour, ou qui me montre incapable de l’accueillir, captif de mes préoccupations, de mes fatigues ou de mes peines ? Ou bien est-ce lui qui m'accueille dans la vie et m'apparait parfois, me laissant voir qu'il est là, qui me fait lever les yeux et qui me met en mouvement.
Ainsi frères et sœurs, quand la chaleur est trop lourde, quand la fatigue est trop grande, quand rien ne nous dispose à aller chercher Dieu ni même à le recevoir, il est toujours possible qu’une parole nous fasse lever les yeux, qu’une parole nous relève, qu’une parole nous ouvre sur un avenir… Parce que Dieu est déjà là, il nous accueille dans la vie et il se réjouit de nous y voir.
Amen
Photo by Eelco Böhtlingk on Unsplash
Pasteur de l'Eglise Réformée de France, amateur de jeux de société, de cinéma, de longues discussions
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