Dieu a brûlé mes idoles
Publié le 9 Avril 2008
Prédication du dimanche 6 avril 2008
Actes II, 14 à 33
Luc XXIV, 13 à 25
Cantique 619, 1 et 3
Psaume XVI
Le sort qui m’échoit est délicieux, la part que j’ai reçue est la plus belle. C’est beau comme un spot publicitaire : avec Dieu tu auras tout, le sourire de star du ciné, la belle maison, la décapotable et le top-model qui va avec. Avec Dieu, ma vie est encore plus belle qu’avec l’ami Ricoré. Avec le Seigneur pour ami, tu as le succès, l’argent, la santé, la famille et ta femme, elle revient !
C’est merveilleux mais… et mes soucis si réels, les drames de ma vie, et mes blessures publiques et secrètes, et cette souffrance que je n’arrive même pas à dire, c’est parce que Dieu m’a abandonné ? C’est parce que je ne crois pas assez ? Pas assez bien ? Ou pas assez fort ? Pourquoi cette joie que chante le psalmiste m’est-elle refusée ?
Mais si l’on y regarde de plus près, ce psaume est attribué à David. C’est dans la bouche de David que le psalmiste place cette affirmation : Le sort qui m’échoit est délicieux. Rien de surprenant à cela, me direz vous, comment le roi David, le grand toi d’Israël pourrait-il ne pas se réjouir de son sort ? On reste donc bien dans la page de publicité. Eh bien, si je lis l’histoire de la vie de David, je me dis que je n’aimerais pas être à sa place, non parce que je suis bien trop paresseux pour endosser les responsabilités royales ou bien trop lâche pour assumer la fonction de chef de guerre, mais tout simplement parce que la vie de David ne me paraît pas être une vie heureuse. C’est une vie de fuite, une vie de mercenaire pour une armée étrangère, c’est une vie de drames : mort de son ami Jonathan, mort du fils de Bethsabée, guerre contre son propre fils, Absalom et meurtre de celui-ci par la main d’un soldat de David. Ce n’est pas vraiment ce que j’appellerais une vie heureuse…. Ainsi, la joie du psalmiste n’est pas celle du bonheur tel que nous l’entendons. Nous ne sommes pas ici devant un portrait « glamour » de la vie du croyant.
Je crois que pour comprendre la joie du psalmiste, il faut passer par les mystérieux versets 3 et 4 Dans les saints du pays et dans les magnifiques, tout mon plaisir. Leurs ravages sont nombreux, ils se hâtent vers un autre. Je ne verserai pas leur libation de sang.
Je reconnais que c’est un peu obscur. Quelques remarques donc. La proximité en hébreux entre « ravages » et « idoles » et la référence aux libations de sangs montrent que le verset 4 parle de l’idolâtrie. Mais qu’en est-il du verset 3, qui sont ces saints et ses magnifiques. A cause de la structure du psaume, je pense qu’ils correspondent aux attributs (saints et grands) qu’on donnait aux divinités cananéennes et sont les idoles dénoncées aux versets 4, le plan du psaume serait donc : confession de foi / rejet des idoles / affirmation de la fidélité de Dieu, e qui me paraît plus naturel que confession de foi (incise sur le peuple de Dieu) rejet des idoles / affirmation de la fidélité de Dieu. Je me rallie donc à l’interprétation de la TOB : Les divinités de cette terre, ces puissances qui me plaisaient tant, augmentent leurs ravages ; on se rue à leur suite. Mais je ne leur offrirai plus de libations de sang, et mes lèvres ne prononceront plus leurs noms.
La joie du psalmiste, bien plus que dans nos images toutes faites du bonheur, est donc dans la fidélité de dieu et dans sa délivrance de l’idolâtrie
Mais qu’est ce que l’idolâtrie ?
Première définition : l’idolâtrie c’est l’adoration d’autres dieux que Dieu. Cette définition ne nous entraîne pas très loin. Sauf à considérer que les religions non chrétiennes ou non abrahamiques sont idolâtres, ce qui se discute, l’idolâtrie n’est plus vraiment répandue dans notre société et ne nous concerne plus beaucoup. J’aurais donc mieux fait de ne pas m’attarder sur ce psaume 16… Mais on peut élargir cette définition.
Deuxième définition: l’idolâtrie, c’est vouer un culte à autre chose que Dieu. Et là, les idoles surgissent de partout, aujourd’hui encore, culte de l’argent, du travail, du moi, culte de la famille, culte du plaisir, du pouvoir et que sais-je encore. Elles sont myriades nos idoles…
J’ouvre une parenthèse : l’idolâtrie n’a rien à voir avec la morale (la morale elle-même peut d’ailleurs être une idole). Nous ne parlons pas ici en terme de c’est bien ou c’est mal : il n’y a aucun mal à attacher une importance immense à sa famille ou à son travail où à sa santé. Seulement, c’est être idolâtre.
J’ai dit au Seigneur, je n’ai pas de plus grand bonheur que toi… Je garde sans cesse le Seigneur devant moi. Le psaume XVI, m’invite à élargir encore la définition…
Troisième définition : l’idolâtrie, c’est, dans sa vie, donner, à quoi que ce soit autant, voire plus d’importance qu’à Dieu lui-même. Cela ne signifie qu’il faille penser à Dieu et prier 7 jours sur 7, 24 heures sur 24 sans détourner notre pensée de Lui ne fut-ce qu’une seconde. C’est à la fois plus profond et plus léger : il s’agit de reconnaître que rien n’a plus de poids, plus d’importance, rien n’est plus décisif pour notre vie que Dieu.
En fait, être délivré de l’idolâtrie c’est comprendre qu’à part Dieu, il n’y a rien d’absolu. Tout, absolument tout est relatif. Ce qui ne signifie pas sans importance, mais passager, transitoire, modifiable, révisable. Tout est relatif, c'est-à-dire rien n’est sacré, rien n’est suffisamment fort pour avoir un poids définitif. Et ce tout est relatif, cela inclus bien sûr la morale, la religion, l’Eglise, la Bible même… Tout. Sauf Dieu. Dieu seul est dieu.
Et c’est une libération immense. Parce que relativiser, c’est prendre du recul. Du recul par rapport à ce qui nous accable, du recul aussi par rapport à ce que nous avons perdu ou à ce que nous avons peur de perdre… Cette libération est une guérison parce qu’elle vient me dire que ce qui me fait si mal, ce qui me semble me détruire a, finalement, moins de poids que Dieu qui m’aime et me fait vivre. Rien ne peut nous séparer de l’amour de Dieu manifesté en Jésus Christ.
C’est une libération qui nous est offerte. David le dit : ce qui le délivre des idoles c’est que la part qu’il a reçu, c’est Dieu. Or si David reçoit cette part à la force de ses bras, alors, il prends plus de pouvoir, plus de poids que Dieu. Si Dieu seul est Dieu, Dieu seul peut donner Dieu à David. C’est donc bien Dieu qui nous délivre de nos idoles.
De plus, nous avons tous vu combien cette définition fait de nous tous des idolâtres, nous dit combien nous sommes rapides à donner à d’autres que Dieu l’importance, c'est-à-dire la gloire qui ne revient qu’à Lui. Mais nous désespérer reviendrait à faire de notre incapacité à être fidèle une idole de plus. Si je crois que mon infidélité me sépare de Dieu, qu’elle a le pouvoir de s’opposer à lui, je donne à mon infidélité plus de poids qu’à Dieu. De même si je crois que c’est ma fidélité qui fait que Dieu m’est fidèle. Etre libéré de mes idoles, c’est m’apercevoir que Dieu est fidèle même quand je lui suis infidèle.
C’est une libération immense, c’est une libération offerte mais c’est une libération exigeante. C’est une libération qui a un prix.
Dans les saints du pays, dans les grands se trouve tout mon plaisir (Ps XVI). Tout comme le psalmiste, je les aime ces idoles que
Dieu fait tomber. Comme les dieux cananéens marquaient le rythme des saisons et expliquaient le monde, mes idoles structurent ma vie et lui donnent un sens. Elles me servent de points de repères,
voire d’ancrage. Elles me guident dans mes choix. En me les enlevant, Dieu me déstabilise. Etre délivré de mes idoles, c’est aussi être privé du confort de mes certitudes, c’est être placé devant
l’absurdité de l’existence.Actes II, 14 à 33
Luc XXIV, 13 à 25
Cantique 619, 1 et 3
Psaume XVI
Le sort qui m’échoit est délicieux, la part que j’ai reçue est la plus belle. C’est beau comme un spot publicitaire : avec Dieu tu auras tout, le sourire de star du ciné, la belle maison, la décapotable et le top-model qui va avec. Avec Dieu, ma vie est encore plus belle qu’avec l’ami Ricoré. Avec le Seigneur pour ami, tu as le succès, l’argent, la santé, la famille et ta femme, elle revient !
C’est merveilleux mais… et mes soucis si réels, les drames de ma vie, et mes blessures publiques et secrètes, et cette souffrance que je n’arrive même pas à dire, c’est parce que Dieu m’a abandonné ? C’est parce que je ne crois pas assez ? Pas assez bien ? Ou pas assez fort ? Pourquoi cette joie que chante le psalmiste m’est-elle refusée ?
Mais si l’on y regarde de plus près, ce psaume est attribué à David. C’est dans la bouche de David que le psalmiste place cette affirmation : Le sort qui m’échoit est délicieux. Rien de surprenant à cela, me direz vous, comment le roi David, le grand toi d’Israël pourrait-il ne pas se réjouir de son sort ? On reste donc bien dans la page de publicité. Eh bien, si je lis l’histoire de la vie de David, je me dis que je n’aimerais pas être à sa place, non parce que je suis bien trop paresseux pour endosser les responsabilités royales ou bien trop lâche pour assumer la fonction de chef de guerre, mais tout simplement parce que la vie de David ne me paraît pas être une vie heureuse. C’est une vie de fuite, une vie de mercenaire pour une armée étrangère, c’est une vie de drames : mort de son ami Jonathan, mort du fils de Bethsabée, guerre contre son propre fils, Absalom et meurtre de celui-ci par la main d’un soldat de David. Ce n’est pas vraiment ce que j’appellerais une vie heureuse…. Ainsi, la joie du psalmiste n’est pas celle du bonheur tel que nous l’entendons. Nous ne sommes pas ici devant un portrait « glamour » de la vie du croyant.
Je crois que pour comprendre la joie du psalmiste, il faut passer par les mystérieux versets 3 et 4 Dans les saints du pays et dans les magnifiques, tout mon plaisir. Leurs ravages sont nombreux, ils se hâtent vers un autre. Je ne verserai pas leur libation de sang.
Je reconnais que c’est un peu obscur. Quelques remarques donc. La proximité en hébreux entre « ravages » et « idoles » et la référence aux libations de sangs montrent que le verset 4 parle de l’idolâtrie. Mais qu’en est-il du verset 3, qui sont ces saints et ses magnifiques. A cause de la structure du psaume, je pense qu’ils correspondent aux attributs (saints et grands) qu’on donnait aux divinités cananéennes et sont les idoles dénoncées aux versets 4, le plan du psaume serait donc : confession de foi / rejet des idoles / affirmation de la fidélité de Dieu, e qui me paraît plus naturel que confession de foi (incise sur le peuple de Dieu) rejet des idoles / affirmation de la fidélité de Dieu. Je me rallie donc à l’interprétation de la TOB : Les divinités de cette terre, ces puissances qui me plaisaient tant, augmentent leurs ravages ; on se rue à leur suite. Mais je ne leur offrirai plus de libations de sang, et mes lèvres ne prononceront plus leurs noms.
La joie du psalmiste, bien plus que dans nos images toutes faites du bonheur, est donc dans la fidélité de dieu et dans sa délivrance de l’idolâtrie
Mais qu’est ce que l’idolâtrie ?
Première définition : l’idolâtrie c’est l’adoration d’autres dieux que Dieu. Cette définition ne nous entraîne pas très loin. Sauf à considérer que les religions non chrétiennes ou non abrahamiques sont idolâtres, ce qui se discute, l’idolâtrie n’est plus vraiment répandue dans notre société et ne nous concerne plus beaucoup. J’aurais donc mieux fait de ne pas m’attarder sur ce psaume 16… Mais on peut élargir cette définition.
Deuxième définition: l’idolâtrie, c’est vouer un culte à autre chose que Dieu. Et là, les idoles surgissent de partout, aujourd’hui encore, culte de l’argent, du travail, du moi, culte de la famille, culte du plaisir, du pouvoir et que sais-je encore. Elles sont myriades nos idoles…
J’ouvre une parenthèse : l’idolâtrie n’a rien à voir avec la morale (la morale elle-même peut d’ailleurs être une idole). Nous ne parlons pas ici en terme de c’est bien ou c’est mal : il n’y a aucun mal à attacher une importance immense à sa famille ou à son travail où à sa santé. Seulement, c’est être idolâtre.
J’ai dit au Seigneur, je n’ai pas de plus grand bonheur que toi… Je garde sans cesse le Seigneur devant moi. Le psaume XVI, m’invite à élargir encore la définition…
Troisième définition : l’idolâtrie, c’est, dans sa vie, donner, à quoi que ce soit autant, voire plus d’importance qu’à Dieu lui-même. Cela ne signifie qu’il faille penser à Dieu et prier 7 jours sur 7, 24 heures sur 24 sans détourner notre pensée de Lui ne fut-ce qu’une seconde. C’est à la fois plus profond et plus léger : il s’agit de reconnaître que rien n’a plus de poids, plus d’importance, rien n’est plus décisif pour notre vie que Dieu.
En fait, être délivré de l’idolâtrie c’est comprendre qu’à part Dieu, il n’y a rien d’absolu. Tout, absolument tout est relatif. Ce qui ne signifie pas sans importance, mais passager, transitoire, modifiable, révisable. Tout est relatif, c'est-à-dire rien n’est sacré, rien n’est suffisamment fort pour avoir un poids définitif. Et ce tout est relatif, cela inclus bien sûr la morale, la religion, l’Eglise, la Bible même… Tout. Sauf Dieu. Dieu seul est dieu.
Et c’est une libération immense. Parce que relativiser, c’est prendre du recul. Du recul par rapport à ce qui nous accable, du recul aussi par rapport à ce que nous avons perdu ou à ce que nous avons peur de perdre… Cette libération est une guérison parce qu’elle vient me dire que ce qui me fait si mal, ce qui me semble me détruire a, finalement, moins de poids que Dieu qui m’aime et me fait vivre. Rien ne peut nous séparer de l’amour de Dieu manifesté en Jésus Christ.
C’est une libération qui nous est offerte. David le dit : ce qui le délivre des idoles c’est que la part qu’il a reçu, c’est Dieu. Or si David reçoit cette part à la force de ses bras, alors, il prends plus de pouvoir, plus de poids que Dieu. Si Dieu seul est Dieu, Dieu seul peut donner Dieu à David. C’est donc bien Dieu qui nous délivre de nos idoles.
De plus, nous avons tous vu combien cette définition fait de nous tous des idolâtres, nous dit combien nous sommes rapides à donner à d’autres que Dieu l’importance, c'est-à-dire la gloire qui ne revient qu’à Lui. Mais nous désespérer reviendrait à faire de notre incapacité à être fidèle une idole de plus. Si je crois que mon infidélité me sépare de Dieu, qu’elle a le pouvoir de s’opposer à lui, je donne à mon infidélité plus de poids qu’à Dieu. De même si je crois que c’est ma fidélité qui fait que Dieu m’est fidèle. Etre libéré de mes idoles, c’est m’apercevoir que Dieu est fidèle même quand je lui suis infidèle.
C’est une libération immense, c’est une libération offerte mais c’est une libération exigeante. C’est une libération qui a un prix.
Dieu nous délivre de nos idoles, il ne nous installe pas dans une verte vallée de savoir, il ne nous conduit pas sur une autoroute
bien balisée mais il nous jette sur un sentier de vie. Un sentier, c’est rarement droit, ce n’est pas toujours bien indiqué, il y a des passages difficiles, des moments où l’on se sent perdu.
Mais c’est le mouvement et donc c’est la vie.
Frères et sœurs, que tombent donc nos idoles et que d’un pas léger nous nous lancions sur ce sentier parfois riant, parfois sombre. Que sur tout ce qui nous pèse et nous oppresse, Dieu nous donne du recul et que ce recul, nous en témoignions par notre humour et notre liberté.
Amen
Frères et sœurs, que tombent donc nos idoles et que d’un pas léger nous nous lancions sur ce sentier parfois riant, parfois sombre. Que sur tout ce qui nous pèse et nous oppresse, Dieu nous donne du recul et que ce recul, nous en témoignions par notre humour et notre liberté.
Amen