Prédication du dimanche 22 juin 2008
Baptême de Maëlle
Psaume 133
Un baptême, même un baptême d’enfant est toujours question d’engagement. Il y a les engagements de Régis et Marie Laure, les parents de Maëlle, les engagements d’Amandine et de Stéphane, ses
parrain et marraine. Mais parmi ces engagements, ceux de l’assemblée toute entière sont sans doute les plus grands.
Je ne veux pas dénigrer les engagements de Régis, Marie Laure, Amandine et Stéphane, il est tout à fait important voir fondamental qu’ils parlent plus tard de son baptême à Maëlle. C’est eux qui
devront prendre la responsabilité de l’envoyer au caté. Ils seront pour elle les premiers témoins de l’amour de Dieu. Mais franchement, si cette responsabilité est importante, ça ne me paraît
tout de même pas être la mer à boire.
En revanche, en tant que communauté, nous avons à réaliser le psaume 133 pour Maëlle. Nous avons à être cette communauté fraternelle, cette communauté qui accueille et honore, cette communauté
qui dit et qui est la bénédiction de Dieu.
Oui avant tout ce que nous avons à offrir à Maëlle, c’est un lieu où des frères et sœurs se retrouvent ensemble. Frères et sœurs… J’aime que l’Eglise repose sur ce vocabulaire de la famille.
Maëlle n’entre pas aujourd’hui dans un club d’amis dont elle partagerait les intérêts, elle ne rejoint pas une bande ou une équipe dont elle devrait porter les couleurs. Elle est accueillie dans
une famille qui est la sienne, au-delà de sa famille de sang. C’est une famille qui présente une particularité : celle de n’être qu’une gigantesque fratrie. Il n’y a pas dans l’Eglise différents
degrés de parenté. Il n’y pas de lien de filiation qui viendrait introduire une hiérarchie. Parce que nous n’avons qu’un seul Père : nous sommes tous frères et sœurs. Et pour ceux qui voudraient
se prévaloir d’un quelconque droit d’aînesse, je les encourage à aller regarder du côté de Jacob, de Joseph, de David et de voir à quel point Dieu se rit du droit d’aînesse… Oh, je ne prétendrais
pas que l’Eglise est la famille idéale, comme toute les familles elle a ses difficultés, ses pesanteurs parfois ses conflits. Je voudrais m’arrêter sur une difficulté e la famille et de l’Eglise,
une difficulté que nous avons soulignée dans nos engagements : Aucune contrainte ne la retiendra dans la communauté
chrétienne mais, si elle vient à s'en séparer, vous affirmerez qu'elle peut toujours y retrouver sa place . Il existe des brouilles dans les familles, il existe la tentation de dire à son
frère : « tu n’es plus mon frère ». Cette tentation du jugement et du rejet existe aussi dans l’Eglise mais aujourd’hui, nous avons pris l’engagement de ne pas y succomber, de ne pas couper le
lien quoiqu’il arrive. Mais dire que nous ne couperons pas le lien, c’est prendre le risque que ce lien soit vécu comme une chaîne, un étouffement. Comme toutes les familles, l’Eglise est prise
dans la difficulté de dire que le lien ne sera pas rompu mais que l’individu garde toute sa liberté. Ce n’est pas facile de dire à Maëlle qu’elle est et sera toujours libre de partir mais qu’une
fois partie elle conservera la liberté de revenir. L’Eglise, comme toute les familles connaît la tentation d’un amour lierre qui agrippe et étouffe. Mais aujourd’hui, nous avons pris l’engagement
de ne pas céder à cette tentation. Aujourd’hui, il ne s’agit pas de dire à Maëlle : « tu appartiens à l’Eglise » mais de lui dire « l’Eglise t’appartient : elle est et sera là pour toi, à ton
service ».
Je ne veux pas prétendre ce matin que l’Eglise est une famille idéale mais ce matin nous avons pris l’engagement que pour Maëlle, ce sera une famille belle et bonne à retrouver.
C’est comme l’huile parfumée sur la tête d’Aaron qui descend jusqu’à sa barbe, jusqu’au bord de ses vêtements. Il n’y a pas d’onction lors d’un baptême protestant, l’eau avec laquelle nous avons
baptisé Maëlle, n’est qu’une bête eau du robinet… Et pourtant, ce matin, nous nous sommes engagés à l’onction. L’huile parfumée qui coule sur la tête d’Aaron, jusqu’à sa barbe, jusqu’à son
vêtement, c’est le geste d’onction, le geste qui sacre les rois et les prêtres. Eh bien, en entrant dans notre communauté, Maëlle doit s’y sentir comme une reine, comme la grande prêtresse, comme
le personnage le plus important de la communauté. Cela est vrai aujourd’hui où elle est sans doute la reine de la fête mais cela doit être vrai à chaque fois qu’elle est avec nous. Et cela doit
être vrai pour toi, pour toi et pour toi, pour chacun d’entre nous. Sais-tu que tu es pour nous aussi important, aussi précieux qu’Aaron, le grand prêtre ? Sais-tu que nous reconnaissons en toi,
le visage de Dieu ? Savons-nous suffisamment te le dire, te le montrer ?
Régis et Marie Laure m’ont gentiment dit qu’ils avaient été touchés par la manière dont ils ont été accueillis par notre communauté à Vernon. Tant mieux ! Mais cet accueil, cette fraternité
peuvent et doivent toujours être améliorés. Je pense qu’en la matière, il ne doit pas y avoir de place pour une quelconque philosophie de décroissance. En ce qui concerne l’accueil, la
reconnaissance de l’autre, l’amour qui nous unit, nous devons faire toujours mieux, toujours plus. Nous devons être débordant comme la rosée du mont Hermon descendant sur les collines. Il faudra
que toutes les Maëlle qui viennent à nous se s entent toujours plus accueillis. Je voudrais d’ailleurs m’adresser à Régis et Marie Laure, cet engagement de la communauté vis-à-vis de Maëlle et
vis-à-vis de vous, c’est aussi votre engagement. En effet, nous espérons que vous aussi, à votre manière, participerez à donner à notre communauté ce visage ouvert.
Mais pourquoi cet accueil de Maëlle ? Pourquoi voulons-nous que demain, elle puisse en regardant notre communauté, s’exclamer avec le psalmiste « Quel bonheur, quel douceur pour des frères
d’être ensemble ? ». Ce n’est pas pour fidéliser une paroissienne de plus, ce n’est pas pour gagner une future cotisante, ce n’est pas pour grossir nos effectifs. Non. C’est pour qu’ainsi nous
puissions témoigner à Maëlle du plus grand des engagements qui a été pris lors de son baptême. Non pas celui de ses parents, non pas celui de la communauté mais celui de Dieu, un engagement qu’il
a pris vis-à-vis d’elle bien avant son baptême, avant sa naissance même. Un engagement qu’il a déjà tenu : celui de l’aimer et d’aller jusqu’au bout de son amour pour elle. Et ces renversements
dont nous avons parlé, Jésus les a manifesté en recevant le baptême de Jean. Dieu est venu à nous dans le don et dans l’amour.
Amen.