Bartimée : le manteau, la halte et l'écoute

Publié le 25 Octobre 2009

Prédication du 25 octobre 2009

Jérémie XXXI, 7 à 9

Marc X, 46-52

Accueil de Cyrille et Antoine

Célébration œcuménique

 

Je suis embêté... J'ai trouvé ce manteau. Jean Claude, c'est à toi ? C'est à vous monsieur ? Bon. Il y a peut-être un nom à l'intérieur ou un papier dans la poche. Hey, ça vient de Jéricho : c'est pas la porte à côté dis-donc. Ah ! C'est le manteau de Bartimée. Alors je suis rassuré, Bartimée n'en a plus besoin. Ce manteau, c’est une prison en fait. C'est toute l'ancienne vie de Bartimée, celle qu'il avait avant que Jésus fasse son miracle. Vous savez quel miracle Jésus a fait pour Bartimée ? Il lui a rendu la vue. Oui mais en fait ça c'est le troisième miracle que Jésus a fait pour Bartimée. Et à ce moment, Bartimée s'était déjà débarrassé de son manteau.

Et ce qui a libéré Bartimée de son manteau, de son ancienne vie de mendiant aveugle, ce sont les deux premiers miracles de Jésus. Jésus s'est arrêté et Jésus l'a appelé.

 

Jésus s'est arrêté. Ca n'a l'air de rien mais c'est la seule fois où l'on nous dit que Jésus s'arrête parce que quelqu'un l'a appelé. Dans l'évangile selon Marc en particulier, Jésus semble tout le temps en mouvement, passant d'un lieu à un autre. Et voilà que Jésus s'arrête au plus fort de sa course, dans sa montée vers Jérusalem, alors qu'il est presque arrivé et donc que c'est le plus dur de s'arrêter. Si vous voulez le vérifier : lors du prochain long trajet en voiture, guettez les derniers kilomètre et dès que vous êtes à moins de 10 kilomètres, demandez à vos parents de s'arrêter. Vous verrez la réaction.

Jésus s'arrête parce que Bartimée l'appelle. C'est à noter même si ce n'est pas la seule fois que Jésus répond à un appel, parce qu'en fait Bartimée est emblématique de tous ceux qui appellent Jésus. En effet, d'habitude, c'est Jésus qui appelle le premier. Mais parfois, des hommes ou des femmes prennent l'initiative. Or ces hommes et ces femmes, ce sont toujours des gens qu'on ne veut pas entendre : un légionnaire romain, une femme qui perd son sang ou, ici, un mendiant aveugle. On essaye de faire taire Bartimée mais Jésus, lui, l'entend. Jésus accepte de se laisser arrêter par l’aveugle au bord du chemin. Et cela s’est déjà une libération.

C'est important d'être entendu. Pensez à ces moments où tous courent autour de nous, où nous aimerions que nos parents, nos conjoints, nos collègues s'arrêtent de courir pour nous écouter. Eh bien Jésus lui, s'arrête pour nous écouter.

Dans notre prière, rappelons-nous cela. Jésus nous entend. Il s'arrête. Il prend le temps pour nous. Il ne nous dit pas : je n'ai pas le temps, je suis pressé.

 

         Et en s’arrêtant, Jésus va libérer Bartimée de son manteau, de son manteau, c'est-à-dire de son passé, de sa misère.

         En s’arrêtant, en l’appelant (ou plutôt en le faisant appeler mais j’y reviendrai) et en lui posant une question… Une question assez idiote, à première vue. « Que veux-tu que je fasse pour toi ? ». A votre avis qu’est ce que l’aveugle Bartimée peut bien vouloir que Jésus fasse pour lui ? Oui, lui rendre la vue, vous avez raison. Mais c’était trop facile, vous avez écouté le texte. Allez une autre question plus difficile : un homme paralysé des deux jambes, appelle Jésus. Que veut-il que Jésus fasse pour lui ? Un muet fait signe à Jésus, que veut-il que Jésus fasse pour lui ? Ah décidément vous êtes très forts. Et donc la question de Jésus est bien une question idiote.

         Sauf que s’il ne l’avait pas posée, s’il avait simplement dit à Bartimée « d’accord, je te rends la vue », Jésus n’aurait pas vraiment écouté l’homme Bartimée, en fait, il l’aurait enfermé à nouveau dans son manteau d’aveugle. Dans Vol 714 pour Sidney, le capitaine Haddock voit un malheureux émigrant endormi sur un banc. Il sait bien ce qu'il peut faire pour lui et pose un peu d’argent dans son chapeau. Pas de chance, le petit émigrant n'est autre que le multimilliardaire Carreidas. Il nous arrive très souvent d’enfermer l’autre dans l’image que nous avons de lui, de savoir ce qu’il veut avant même de lui avoir laissé une chance de nous le dire. Jésus laisse Bartimée être autre chose que l’aveugle au bord du chemin et cela, c’est déjà une libération.

Jésus nous connaît, il nous laisse être nous-mêmes au-delà de l’image que les autres ont de nous. Pour lui, je suis plus que le pasteur désordonné et bavard, pour lui tu es plus que ce cette image, jolie fille, intello, sportif, flemmard ou que sais-je encore, dans laquelle tu te sens si souvent enfermé.

 

         Enfin Jésus fait appeler Bartimée. Et ça, ça pose une question directement à nos Eglises, qu’elle soit catholique ou protestante. Que disons-nous de Jésus-Christ à ceux que nous rencontrons sur notre chemin. Est-ce que nous les rabrouons en leur disant « Tais-toi ! Tu n’es pas assez bien, pas assez sage, pas assez intelligent, pas assez dans la bonne doctrine, tu fais trop de bruit, tu nous embête et  tous ce que nous pouvons dresser comme obstacle pour filtrer ceux qui sont trop différents de nous». Ou bien est ce que nous leur disons : "Courage, il t'appelle" ? Est-ce que nous les enfermons encore un peu plus dans le manteau de leur misère, de leur passé ou bien est ce que nous les aidons à trouver à s’en libérer ?

 

Frères et sœurs, avec Bartimée nous pouvons reconnaître en Jésus celui qui se laisse arrêter, celui qui prend le temps de nous écouter vraiment, celui qui nous libère du manteau dans lequel nous nous débattons.

Avec les disciples de Jésus, nous pouvons à notre tour, reconnaître nos frères et des sœurs comme des hommes et des femmes au-delà des images dans lesquelles nous les enfermons trop souvent

 

Amen

Rédigé par Eric George

Publié dans #Bible

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