17 Septembre 2006
« Dans la septième Controverse éditée par le professeur Khoury, l'empereur (Manuel II Paleologus, empereur de Byzance) aborde le thème du Jihad (la Guerre sainte). L'empereur devait savoir que la sourate 2-256 dit : Il n'est nulle contrainte en matière de foi. (…) Mais l'empereur connaissait aussi naturellement les commandements sur la Guerre sainte (…). Il lui dit : « Montre-moi donc ce que Mahomet a apporté de nouveau. Tu ne trouveras que des choses mauvaises et inhumaines, comme le droit de défendre par l'épée la foi qu'il prêchait. » (…) Une telle violence est contraire à la nature de Dieu et à la nature de l'âme : Dieu n'aime pas le sang et agir de manière déraisonnable est contraire à la nature de Dieu. La foi est le fruit de l'âme et non du corps. Celui qui veut donc conduire quelqu'un vers la foi doit être capable de parler bien et de penser juste, et non de violence et de menace... Pour convaincre une âme raisonnable, on n'a pas besoin de son bras, ni d'armes, ni d'un quelconque moyen par lequel on peut menacer quelqu'un de mort... La phrase décisive dans cette argumentation contre la conversion par la violence, c’est : Agir de manière déraisonnable est contraire à la nature de Dieu. »
Sur la citation de l’empereur byzantin pas grand chose à dire. De manière anachronique, on pourrait juste faire remarquer qu’elle nécessite de deux démonstrations. D’une part, prouver que les violences et crimes chrétiens sont des dérives graves par rapport au message initial de l’Evangile (ce dont je ne doute pas). Et d’autre part, démontrer que les violences musulmanes sont, quant à elles, fidèle à la révélation de Mahomet (ici la discussion me semble ouverte et j’avoue n’être certain de rien tant les réactions des musulmans m'inquiètent).
Sur le choix de cette citation par le pape, je suis plus dubitatif. Peut-on vraiment croire qu’un homme de l’intelligence de Benoît XVI n’ait pas perçu ce qu'elle pouvait avoir d’insultant pour les musulmans ? Je crois surtout qu’il s’est montré fidèle à la ligne de conduite qui était déjà la sienne quand il n’était « que » le cardinal Ratzinger : que l’Église catholique romaine soit ouverte certes mais qu’elle n’oublie pas qu’elle est seule détentrice de la Vérité… Une ligne de conduite dont l’œcuménisme a fait les frais à l’époque de Dominus Iesus… Ceci dit, je préfère pourtant cette attitude qui a le mérite d'être claire à une ouverture qui tend à absorber et assimiler l'autre.
Que dire de la réaction du monde musulman ? Exagérée, sans doute opportuniste, et prouvant un refus grave de la critique… Sans même mentionner l’imbécillité de ceux qui entendent protester contre l’accusation de violence en incendiant des églises. Il en est pourtant une qui a retenu mon attention par son intelligence et sa modération : Cela me rappelle la réaction d’un collègue lorsque le futur Benoît XVI avait écrit (dans un texte bien plus officiel qu’un discours) Le pasteur Anderson Moubitang avait simplement dit à l'époque“eh bien ça prouve que l’Eglise dont parle Ratzinger n’est pas mon Eglise”... Une réaction intelligente, je trouve... En tout cas je me demande ce que ça aurait donné si les protestants avaient alors réagis comme les musulmans... Des églises catholiques incendiées aux Etats Unis, l’Europe du nord indignée et le Danemark rappelant son ambassadeur du Vatican, ça aurait été rigolo...
Dominus Iesus
Pasteur de l'Eglise Réformée de France, amateur de jeux de société, de cinéma, de longues discussions
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