13 Mars 2007
Tiens ! Et si on parlait politique, un peu ! C’est vrai quoi ! La campagne présidentielle occupe de plus en plus les esprits et les pages des journaux. Il serait peut-être un peu temps que je m’y mette…
En effet, je réfute catégoriquement l’assertion « l’Église ne doit pas faire de politique ». Au contraire, toute Église doit tout faire pour rester un interlocuteur des pouvoirs politiques. Pas un laquais, ni un alibi. Certainement pas un maître ou un directeur de conscience. Mais un interlocuteur, prêt à critiquer, à proposer d’autres voies, à dire non ou au contraire à encourager. La liberté d’une Église, c’est de ne pas se poser en gouvernant potentiel. Elle peut donc s’affranchir de la nécessité de séduction électorale. De plus, se réclamant d’un message radical, d’une bonne nouvelle qui bouleverse les regards que nous portons sur notre monde, une Église peut, au risque de se faire taxer d’irréalisme, réfuter bien des prétendues « évidences ». Je ne veux pas d’une Église politicienne et encore moins d’une Église apolitique. Je rêve d’une Église qui se pose en prophète. Une Église qui ne fuit pas la scène politique mais qui y prend la parole. Une Église qui ne cherche pas le pouvoir, ni le compromis mais qui interroge, interpelle, encourage ou dénonce. Librement. Et je trouve bien souvent que les différentes Églises entrent dans cette démarche. Qu’elles montrent qu’elle peuvent être présentes mais avec du recul, militantes mais pas partisanes. Dans cette campagne, nos Églises n’ont pas à se prononcer pour tel ou tel candidat (en revanche dénoncer des idées qui vont à rebours de la bonne nouvelle me paraît légitime….) mais à les interpeller, à les questionner. Je crois qu’elle le font et j’avoue regretter que les médias se fassent davantage l’écho de prises de positions contre l’homosexualité (en oubliant de signaler que certaines Églises ont refusé de signer cette déclaration ou qu’un pasteur l’ayant signée s’est vu désavoué par sa hiérarchie) ou réclamant que Dieu soit nommé dans la constitution européennes plutôt que le défi Michée, ou bien que les 12 propositions pour une société plus juste, qui me paraissent avoir une portée bien plus forte…
Je ne suis pas non plus un fan du devoir de réserve du pasteur. D’une part je suis très attaché aux principes du libre examen et du sacerdoce universel pour accepter l’idée que ma parole ou mes prises de position engagent toute la communauté. Je ne suis pas un gourou, ni un directeur de conscience. Et, Dieu merci, les paroissiens d’Évreux ne se gênent pas pour ne pas être d’accord avec moi. D’autre part, c’est à mon avis donner trop d’importance aux convictions politiques, que de penser que celles ci viennent constituer une entrave à la fraternité d’une communauté. Si l’Évangile n’exclut pas la prise de position politique, il nous invite à prendre un peu de recule vis à vis de nos convictions. Si celui ou celle qui ne partage pas mes opinions cesse d’être mon frère ou ma sœur, alors, je suis dans l’idolâtrie : je vois un autre salut que celui de la grâce. Je ne vois donc pas pourquoi un pasteur devrait faire mystère de ses convictions (toute proportions gardées bien sûr) et afficher une mensongère neutralité.
Et pourtant, ce blog ne deviendra pas un blog de campagne. A priori, vous ne trouverez pas ici de fine analyse des discours de Sarkozy, de spéculations sur les chances de Bayrou ni de rélfexion sur la campagne de Ségolène Royale (une opposition forte aux discours du Front National, en revanche, il a plus de chance). Je m’intéresse à la campagne, je m’informe des programmes des différents candidats, j’ai mes sympathies et mes antipathies (je les crois, du reste, assez transparentes). Je ne pousse pas mon pessimisme quant à l’homme, ni mon anarchisme chrétien jusqu’au bout : je voterai et j’appelle à voter. Je vais même vous confesser que j’adore les soirées d’élections télévisées : je me comporte alors en véritable supporter : je vocifère, je râle, je conteste, j’applaudis (enfin, ça c’est plutôt rare). Mais écrire des articles politiques, franchement, je n’en ai aucune envie. Je suis un piètre analyste politique (un piètre théologien aussi, mais la théologie, ça m’amuse…). Et vous trouverez sur internet, plein de sites et de blogs de droite ou de gauche, de qualité…
Bref, ici, sauf exception, on va continuer à parler de ces choses pas sérieuses, bien plus essentielles. D’accord ?
Pasteur de l'Eglise Réformée de France, amateur de jeux de société, de cinéma, de longues discussions
Voir le profil de Eric George sur le portail Overblog