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Autour de l'eau changée en vin

Autour de l'eau changée en vin

Quand Jésus change l'eau en vin, assistons-nous à un tour de passe-passe ? Ne devrions-nous pas observer les différents personnages du récit ?

Une prédication sur Jean 2, 1 à 12

Tel fut le commencement des signes de Jésus, ce qu'il fit à Cana, de Galilée

Eh bien, ça commence plutôt mal !

 Et je ne parle pas de ce qu'il peut y avoir de problématique à apporter 600 litres supplémentaires à une bande de soiffards qui avaient déjà éclusé les réserves.

Je parle de ce que Jésus a fait à Cana, de Galilée, c'est à dire absolument rien. Relisez le texte : Jean ne nous dit même pas que Jésus a changé l'eau en vin. Sa seule intervention a consisté à donner des consignes. Et encore, s'est -il fait prier pour les donner.

Bref, à Cana de Galilée, Jésus n'a rien fait. Et il l'a fait à contre cœur.

Et, toute provocation mise à part, cela devrait nous éclairer sur la place à donner aux miracles, aux signes.

 

Parce que Jean nous raconte quand même que de l'eau est devenue du vin, et qu'autour de cette eau devenue vin, il y a beaucoup de monde.

Pour commencer, il y a les convives de la noce, mariés inclus. Savent-ils qu'ils sont au bénéfice d'un miracle ? Ont-ils seulement eu conscience que le vin commençait à marquer ? On peut penser que non. En tout cas , le texte ne nous donne aucune précision, comme pour nous indiquer que, dans la majorité des cas - les convives représentent la grande majorité des acteurs de récits - on peut être au bénéfice de l'œuvre de Dieu sans même en être conscient. Ils ne voient pas que Jésus a changé l’eau en vin, ils voient que leurs verres restent pleins.

Parmi ces convives, une mention particulière pour l’organisateur de la noce. L'eau changée en vin lui profite tout particulièrement : tout d'abord, comme organisateur de la noce, il aurait sans doute été le premier blâmé pour le manque de vin. De plus, il constate le changement de vin et il est même capable de reconnaître la qualité supérieure de ce vin nouveau.  Pourtant ce qu'il semble surtout percevoir, c'est l'anomalie que représente ce vin nouveau. « D’habitude, on sert d’abord le bon vin ». Il ne voit pas que Jésus a changé l’eau en vin, il voit un changement de l’ordre des choses.

Parmi ces convives, on trouve également la mère de Jésus. Elle, elle voit le manque, pas ce dont elle manque mais ce dont les autres manquent. Elle ne dit pas "Nous n'avons plus de vin "mais "ils n'ont plus de vin". Elle, elle sait vers qui se tourner pour faire face à ce manque. Et, elle, elle ne laissera pas arrêter par une rebuffade. L'heure n'est pas encore venue, dit Jésus ? Qu’importe , à ce refus, la mère de Jésus va opposer toute son impatience : "Faites tout ce qu'il vous dira" recommande-t-elle aux serviteurs. Elle ne voit pas que Jésus a changé l’eau en vin, elle voit que son fils est là pour répondre au manque du monde.

Et cela nous amène aux serviteurs. Eux ne sont pas des convives. Ils ne goûteront pas cette eau devenue vin. Techniquement, ils ne sont pas bénéficiaires du prodige. Mais eux, ils savent d'où vient ce vin meilleur qu'ils portent aux convives. En cela, ils ont bien reçu un signe : ils savent qu’un vin nouveau, un vin de fête peut être puisé dans des Jarres de pierre pourvu qu'une parole soit crue, qu'un geste, absurde au regard de la situation, soit osé. En effet, face au manque de vin, n'est-il pas absurde d'aller puiser dans des jarres rituelles que l'on vient de remplir d'eau ? S’ils voient que Jésus a changé l’eau en vin, ils voient surtout une possibilité nouvelle.

Enfin, il y a les disciples. Jean nous indique qu'ils étaient présents avec Jésus à la noce. Mais il ne nous dit pas s'ils ont assisté à son échange avec sa mère, s'ils l'ont entendu donner des ordres aux serviteurs, s'ils l'ont vu changer l'eau en vin. Ce que nous dit Jean, c'est qu'ils ont mis leur foi en lui, qu'ils ont cru que par sa présence, la situation avait été transformée

Et, en cela, nous pouvons nous reconnaître en eux : nous n'avons pas vu Jésus opérer des miracles, nous n'avons pas directement entendu ses paroles mais nous croyons qu'il a changé le destin de la noce même si peu s’en sont rendu compte, qu’il a transformé le monde , même si le monde n'en a pas conscience

 

Frères et sœurs, sommes-nous seulement disciples ?

Quand l'eau est chargée en vin, que voyons-nous ? quelle place occupons-nous ?

Comme l'organisateur, constatons-nous un changement ? Sommes-nous bousculés dans nos manières de voir et de faire ? Voyons-nous surgir une logique autre que celles du donnant-donnant, de la compétition, de la peur et de la rancœur ?

Sommes-nous des convives profitant d'un miracle sans même savoir qu'il a eu lieu ? Profitons-nous du pardon rendu possible, des paroles de réconciliation et de consolation, des gestes de bonté, d’amour et de partage sans savoir d’où ils viennent ?

Comme cette femme, voyons-nous le manque du monde, manque de joie, manque d’espérance et nous tournons-nous vers le Seigneur, avec impatience, refusant d’attendre sagement que son heure soit venue et que son règne advienne ?

Sommes-nous ces serviteurs qui, sans forcément comprendre tout ce que le Seigneur commande, osent des gestes absurdes pour partager à tous une joie nouvelle ?

La réponse appartient à chacun d’entre nous, elle varie, sans doute, selon les moments. Mais ne nous laissons pas distraire par le prodige, quand l’eau est changée en vin, regardons ce que cela change en nous.

 

Amen

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À propos
Eric George

Pasteur de l'Eglise Réformée de France, amateur de jeux de société, de cinéma, de longues discussions
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