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Mon samaritain

« Qui est mon ennemi ? » me demande un termite expatrié en Floride lorsque je parle d’amour de l’ennemi… C’est amusant parce que la Bible pose plutôt la question : « qui est mon prochain ? » dans une situation analogue : « aime ton prochain comme toi-même ». Peut-être est-il plus évident de voir en l’autre un ennemi qu’un prochain…
A cette question, Jésus répond par la parabole dite du bon samaritain (Luc X, 29-37)… Pour bien comprendre cette parabole, il faut rappeler que les samaritains étaient méprisés ou détestés par les juifs… La lecture actualisante classique est donc de faire du samaritain de la parabole un immigré pauvre et déconsidéré… C’est complètement approprié.
Pourtant, j’ai vécu, il y a longtemps de cela, une rencontre avec un bon samaritain d’un autre type…
1992 ou 1993 ? Je ne sais plus. C’était un 13 juillet et j’avais appelé un mien cousin à la rescousse pour trimballer mes tonnes de bouquins jusqu’à la gare pour pouvoir rapatrier mes affaires de la fac de théo à Paris, jusqu’à Nancy. Nous voilà donc partis en voiture pour rejoindre la gare de l’Est… Seulement, ce que je n’avais pas pensé, c’est que le 13 juillet à Paris, on est en plein préparatifs pour le 14 et que la plupart des grandes voies sont fermées. Bref nous voilà détournés, déviés, réorientés, au grand dam de mon chauffeur. Il pestera encore davantage quand sa voiture tombera en rade, je ne sais plus très bien où. Nous voilà donc bloqués, de nuit, au milieu de nulle part avec une voiture pleine de sacs de bouquins. C’est alors qu’il s’est pointé. Il avait manifestement commencé à fêter la prise de la bastille. Il ne s’est pas présenté. Il nous a juste demandé si on était en panne, il a écouté la voiture refuser de démarrer, il a essayé à son tour avant d’aller tripatouiller dans le moteur…
Et pendant tout ce temps, il nous expliquait que son ceinturon lui servait à cogner les noirs « dans les dents, ils aiment bien ça… ». Raciste, violent, un vrai connard…Je ne sais pas ce que pensait Stéphane, mais moi, je n’en menais pas large, j’attendais le moment où il allait nous piquer la voiture ou au moins nous chercher la bagarre… Mais rien de tout cela, il a réussi à faire redémarrer la voiture, il a accepté qu’on lui donne de quoi se payer un coup à boire et a juste regretté qu’on aille pas boire ce pot avec lui…
Ce soir là, ce « connard » a été mon samaritain, cet étranger que je suis appelé à reconnaître comme mon prochain et à aimer. Pas seulement d’un amour un peu condescendant qui consiste à venir en aide y compris à celui qui ne pense pas comme moi. Non, ce connard, je luis suis reconnaissant, redevable. Je n’oublierais pas que c’est lui qui est venu vers moi et pas le contraire… Le genre de rencontre qui change un regard…

Alors, qui est mon prochain, qui est mon ennemi ? N’est-ce pas au bout du compte la même question : qui suis-je appelé à aimer ?

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À propos
Eric George

Pasteur de l'Eglise Réformée de France, amateur de jeux de société, de cinéma, de longues discussions
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V
Je trouve cette anecdote particulièrement intéressante : rien n'est ni tout "noir" ni tout "blanc". <br />
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E
Le débat continue ici , manifestement Christophe ne comprend pas qu’aimer une personne ne signifie pas aimer ses actes et ses idées et encore moins les accepter. Honnêtement, je ne sais pas si j’aurais eu ce discours si j’avais été noir (je ne pense pas que l’anecdote aurait eu lieu, ceci dit). Ce que je sais c’est que des blessures m’ont été infligées que j’ai pardonnées. D’autres, je ne les ai pas encore pardonnées mais je prie pour avoir la force de le faire. Et dans tout les cas, j’essaye de ne pas oublier que celui ou celle qui m’a fait du mal reste un frère, une sœur à aimer malgré tout.
C
JŽavais pas eu le temps de laisser de commentaires, mais aujourdŽhui c est le jour, jŽen ai dŽailleurs laissé dŽautres sur tes autres post, pas mal ton texte, mais aurais-tu écrit la même chose si tu était noir? tu peux aimer ce "con" comme tu lŽappelles il tŽa laissé tranquille parce que tu es blanc, il a peut être après ta rencontre violer et tabasser avec son ceinturon une petite noire ou un petit arabe......depuis cette date il en a surment tabassé plusieurs des noirs, peut être en a-t-il tué quelques uns...cŽest pour ça quŽil ne mérite pas ton amour...<br /> <br /> http://pensamiento.over-blog.com/<br />
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E
C'est sans doute, toute la différence entre nous. Ton humanisme te conduit à condamner une personne à cause de ses actes. Mon christianisme me conduit à me rappeler que même si je condamne ses actes ou ces idées, tout être humain reste un frère, une soeur à aimer...
C
Beau témoigage d'amour...<br /> Je découvre ce blog et tout comme nos discussions sur TT . Beaucoup de choses me plaisent ici. A bientôt
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C
http://pensamiento.over-blog.com/<br /> Eric : bon celui-là, je vais le laisser histoire qu'on ne me taxe pas de sectarisme. Mais je trouve ça un peu déplacé. Vouloir faire connaître son blog, c'est normal mais ne laisser qu'une adresse sans autre commentaire, ni même (à mon avis) lire un seul article. je trouve ça pas terrible comme procédé...Les prochains du même genre, je les supprime...
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T
ahah! tout a fait approprié en effet ! ;)<br /> <br /> merci de ton passage sur le blog et de ton avis. de meme que pour la reaction sur TT.<br /> <br /> amicalement, <br /> tlt.
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